Le Dauphiné libéré, Edition du 12/09/2007
LA MOTTE-SERVOLEX : MAIS
"Les abeilles se cachent pour ne pas mourir"
Ghislaine GERBELOT
Les apiculteurs des secteurs de Chambéry et Aix-les-Bains sont inquiets
après l'annonce par la préfecture d'une pulvérisation d'insecticide
sur des parcelles de maïs, à partir de jeudi.
Les ruches de Yves Rumiano et Sylvain Flammier déménagent pour
un mois et demi ou deux afin de parer à toute rémanence. Photo
Thierry GUILLOT
Les apiculteurs des secteurs de Chambéry et Aix-les-Bains sont inquiets
après l'annonce par la préfecture d'une pulvérisation d'insecticide
sur des parcelles de maïs, à partir de jeudi. Une inquiétude
partagée par certains maraîchers et arboriculteurs. Ce traitement
collectif, nécessaire pour éradiquer la présence d'un parasite
du maïs - la chrysomèle- dans le département de la Savoie,
concerne 29 communes des agglomérations de Chambéry, Aix-les-Bains
et Yenne. Réalisé par pulvérisation aérienne d'insecticide
dans un périmètre de 10 km, il devait avoir lieu mercredi, mais
a été finalement reporté à jeudi pour tenir «
éloignés les enfants » (ils seront ce jour-là à
l'école) mais aussi pour « laisser le temps aux apiculteurs de
remuer les ruchers », selon Yves Rumiano. Car ceux-ci sont invités
par la direction départementale des services vétérinaires
à déplacer leurs ruches d'au moins 50 mètres.
Apiculteur à La Motte-Servolex au hameau du Montarlet, lui, a pris les
devants dès samedi. Lundi, il avait déplacé près
de 130 ruches dans l'Avant-pays savoyard du côté de Saint-Paul-sur-Yenne
et Loisieux. Une opération qui se fait à la tombée de la
nuit lorsque les abeilles rentrent à la ruche après leur journée
de labeur, ou avant l'aube. Les manipulations ne sont pas sans risques : certaines
abeilles n'avaient pas rejoint encore leur ruche et tournoyaient lundi soir
cherchant leur emplacement, explique Yves Rumiano.
« On est pris un peu au dépourvu »
Très tôt ce matin, il a encore véhiculé 20 ruches
du Viviers-du-Lac jusqu'à Fréterive. « On est pris un peu
au dépourvu. On a reçu une circulaire de la direction départementale
des services vétérinaires seulement lundi ; heureusement ont avait
déjà été tenus au courant par le bouche à
oreille, mais certains petits éleveurs n'ont certainement pas été
avertis. »
S'il n'y aura aucune incidence sur la récolte de 2007, puisqu'elle est
terminée, les apiculteurs sont inquiets pour la suivante. Le déménagement
occasionne du stress, même en période d'hivernage, puisque pour
certains c'est l'occasion de changer de reines. « La cellule royale est
très fragile. Si elle meurt pendant le transport c'est foutu. »
La nouvelle a été brutale pour Sylvain Flammier qui va lui aussi
transporter ses ruches à Fréterive. Pour Yves Rumiano le problème
est autre : « les abeilles risquent de butiner des fleurs qu'elles trouvent
habituellement autour des champs de maïs. Un pollen qu'elles stockeront
dans les cases pour les jeunes abeilles qui risquent, elles, de décliner
». Ils soulèvent ensemble un autre problème : si eux ont
eu la chance de trouver rapidement d'autres terrains où installer leurs
ruches, ce n'est pas le cas pour tous. Et les butineuses ne retrouveront pas
sur leur terre d'accueil les mêmes conditions, par exemple la Renouée
du japon dont elles se délectaient à Viviers-du-lac.
Les traitements qui débuteront jeudi doivent se dérouler sur un
à trois jours, en fonction des conditions météorologiques.
Réalisés par hélicoptère, ils respecteront les distances
minimales d'éloignement de 50 mètres des habitations et des cours
d'eau. « Les conditions ne seront pas réunies pour toutes les parcelles
» note Yves Rumiano en montrant derrière lui le champ de maïs
bordé d'une maison et d'un cours d'eau, et doutant de l'efficacité
de ces mesures.